Le 7 mai nous sommes allés dans cette très jolie région qu’est le Perche, visiter deux jardins très différents, c’était notre première sortie depuis plus d’une année.
Notre amie Lena nous a écrit deux très intéressants descriptifs de ces visites, merci Lena.
« Le jardin François »
Ou le mariage d’une ferme typiquement percheronne avec un jardin d’aujourd’hui.

Dès la réouverture des jardins à la visite nos fans de l’Apja étaient dans les starting-blocks pour profiter au plus tôt des super sorties organisées par Brigitte et Catherine. Au programme du jour, 2 jardins dans le Perche.
La route suit la courbe douce des vallons. Elle permet des coups d’œil sur de beaux paysages sereins, aux grands carrés verts, jaunes ou bruns, quadrillés de haies maintenues et même réhabilitées dans cette région.
Arrivée pile à l’heure au « Jardin François », notre première étape. Le propriétaire, qui a donné son nom au jardin, nous attend, peut-être un peu goguenard devant toutes ces femmes posant beaucoup de questions mais souriant et très accueillant, prêt à nous faire découvrir les trésors qu’il a créés ou réunis dans cette « ferme-jardin »
Premier émerveillement, l’allée d’accès ombragée, bordée d’un foisonnement d’hellébores, scilles, jonquilles, camélias, tulipes, géraniums vivaces, camassias et autres bulbes. Au sommet de la petite grimpette, nouvelle surprise ! On débouche sur un paysage dégagé de beaux bâtiments. Les bruyères d’hiver encore en fleurs forment un large arc de cercle, éclatant, bien rangées, surplombant les marches d’un amphithéâtre. Nous sommes au cœur de la ferme avec ses bâtiments ocre couverts de fleurs. L’accueil avec café et grands palmiers est chaleureux
M. François profite de cette pause pour nous expliquer l’idée qui a présidé à son projet : marier une ferme typique percheronne avec un jardin actuel. Il y a 25 ans, il achète 7 petites fermes en ruines avec 2 règles : « vivre en symbiose avec les agriculteurs du coin et préserver paysages et bâtiments » Les plantes les plus humbles voisinent avec les plus raffinées, sans a-priori. On habite chez les plantes. Notre fermier-jardinier nous distribue des plans mais finalement nous devons lui être sympathiques car il restera notre guide toute la matinée. Traverser la cour de ferme c’est déjà commencer la visite, les près gardent leur vocation et leur utilité, laissant paître les moutons et les ânes qui nous regardent tranquillement prendre notre café devant l’élégante maison d’accueil recouverte de rosiers et de chèvrefeuille.
En grimpant vers une carrière naturelle, vers des haies vives de frênes qui servaient de protection et de séparation, on découvre un chêne centenaire absolument étonnant, des charmes, des érables qui amenaient « l’or dans les jardins », au fond des paulownias. Mais ce champ ne gardera pas cet aspect déshérité, d’ici peu on se promènera au milieu des chèvres et des moutons. Un petit ruisseau, issu d’une des 7 sources existant sur le domaine, arrose les rhododendrons et les azalées, souligne une sculpture monumentale moderne, témoin d’une exposition tenue dans les jardins il y a peu
Puis, voici la colline des magnolias à laquelle on accède par une allée bordée de bruyères, d’ail des ours, de petites fougères plumes, de scilles. La promenade continue par une allée d’euphorbes, de géraniums bleus mélangés à des ancolies menant à une autre source entourée d’azalées blancs, roses, violets, de magnolias. De la pergola recouverte de vigne, on a une belle perspective sur la source et les allées de graviers sinuant entre les petits cours d’eau qui débouchent sur une mare bordée de saules et de hautes herbes élégantes. A l’ombre une chaise longue est là pour nous faire rêver devant les masses bleues des camassias et un superbe paysage bucolique où les moutons ont tout naturellement leur place dans les près vallonnés.
C’est un jardin gai, plein de de couleurs, de lieux où se poser pour admirer et vivre avec la nature, ou même prier sur l’un de ces jolis prie-Dieu de jardin en fonte. C’est un jardin que l’on peut voir en toute saison, même en hiver, « il n’est pas endormi ou éveillé très tôt » Nous y sommes allées en mai quand les bulbes explosent et assurent le spectacle avec les bruyères d’hiver, les hellébores, les camélias. En été ce seront les roses, les choisyas, les lantanas et entourant l’amphithéâtre, les bruyères d’été, les graminées, les hostas. On peut déjà également imaginer les couleurs de l’automne avec la quantité d’arbres, des chênes aux liquidembars, d’arbustes, cotinus, viornes, viburnums, hydrangeas.
C’est un jardin au « naturel sublimé » fait par un horticulteur rêveur inspiré par ses voyages, ses rencontres avec des gens formidables et certains lieux comme l’hôtel des Ursins, lors de sa restauration, rappelé par les encadrements de lignes rouges sur les façades.
Il y a matière à revenir….pour apprécier les vieilles granges restaurées devenues galeries, salles de réception, salles de concert, car M François aime la musique et les arts, ou encore la maison d’hôtes où le panier d’accueil est bien sur garni de produits fermiers….du Perche !!
LES JARDINS DU MONTPERTHUIS
Ces jardins conçus en 2010 par le paysagiste Philippe Dubreuil semblent à première vue l’antithèse du « Jardin François » Au beau milieu d’un champ en légère pente se dresse « le Domaine de la PILLARDIERE ».

Le premier accueil est amusant par des lamas et un petit cheval…percheron bien sûr. Puis à la suite du propriétaire, élégant gentleman farmer, nous pénétrons dans l’immense cour carrée de ce petit manoir, typiquement percheron, dont la restauration commencée il y a plus de 10 ans est encore en cours et ce pour encore 10 ans au moins. L’ensemble s’articule autour d’un manoir construit en 1480, agrandi au 16° siècle, avec sa longère, sa grange seigneuriale marquée des armes de son propriétaire de l’époque, un Prévôt du Perche, écuries et porcheries, fournil à chanvre et puit couvert surmonté d’une croix. Il avait cessé d’être habité noblement depuis la Révolution
Mais pourquoi s’installer ici ? Philippe Dubreuil a depuis l’enfance beaucoup aimé les jardins. Il faut dire que son environnement familial y était propice. Une mère collectionneuse, un père médecin intéressé surtout par la botanique et un grand-père qui en 1920 avait fait connaître les huiles essentielles ! Après 15 ans passés à bourlinguer un peu partout dans le monde comme paysagiste, dont 5 ans en Angleterre, est né le besoin d’avoir quelque chose à lui, en dehors de ses parents installés dans les Alpes, l’envie de se poser. Le Perche avec ses bocages lui rappelle les paysages d’Angleterre, et leur foisonnement de plantes, qu’il a tant aimés. Les bâtiments sont en ruine mais de solides fondations permettent d’envisager son projet : un lieu en autarcie, à l’atmosphère médiévale avec ses nombreux bâtiments autour de la grande cour carrée, rappelant les jardins à l’anglaise mais conçu comme un jardin contemporain avec des rappels de paysages et de jardins rencontrés lors de son périple international. Il est difficile de trouver une colonne vertébrale, un squelette, pour cette création ambitieuse. Mais pour un paysagiste qui n’a pas peur de modifier les paysages à grands coups de pelleteuse, c’est une belle page blanche à écrire.
Il part de la grande cour carrée de 4 000m2. Pour lui donner un volume et une allure différents, il rehausse les niveaux d’1m10, ce qui permet de découvrir le jardin, de dégager les vues et les grands axes. Des terrasses à l’italienne devraient compléter l’ensemble. La promenade se fait sur plusieurs niveaux autour du jardin formel comme dans un cloître, évoqué par les arbres plantés en colonnes étroites le long du mur de la grange. Pas de grands jardins mais une succession de chambres de verdure aux thèmes diverses autour de l’axe principal, une belle allée d’ormes. Successivement, dans la partie centrale du jardin, un ravissant carré aux broderies d’osmanthes et de muhlenbergias assez rares, plantés en leur centre de graminées. Ici, une roseraie avec ses gloriettes et pergolas couvertes de rosiers grimpants, où des bancs accueillants permettent de rêver et de se pénétrer de la beauté et du calme du lieu. Là, la serre conçue par le propriétaire lui-même et fabriquée à Ho Chi Min, pour abriter vivaces et agrumes. L’allée d’ormes se poursuit vers le jardin d’hydrangeas et mène au potager, avec ses légumes anciens., au verger avec ses pommiers en cordons et ses poiriers en palmettes. Puis une éblouissante allée de cerisiers d’ornement encore en fleurs nous conduit vers le verger conservatoire, fort de ses 50 pommiers anciens à cidre et au couteau et doucement vers la campagne plus sauvage. Toujours avec ce souci de créer des vues, des perspectives sont ouvertes sur le manoir en restauration. On entre par des arcades de verdure dans les petits jardins fermés de charmilles, l’un d’entre eux abrite un David nu habillé de lierre à côté des parterres d’hellébores. Des ouvertures en oculus sont percées dans l’axe des champs et des vallons pour se projeter à l’extérieur du jardin. Partout un foisonnement de plantes et de couleurs : Bordures de tulipes multicolores dans les tons de rose, collection de pivoines. dormerias (?) aux fleurs roses. Le bleu est assuré par les népétas, peroskias et bruneras
Par les oculus ouverts sur la campagne, on prend conscience du contraste entre les champs plats et les jardins luxuriants cernés de murs de buis, comme un monastère, si bien intégrés au paysage que l’on a l’impression que cela a toujours été comme çà, que cette couronne de jardins autour d’un manoir séculaire existe depuis longtemps. Le patrimoine est mis en valeur, et l’œil se réjouit de cette harmonie.
Nous repartons dans la douceur des paysages du Perche, l’âme en paix, encore sous le charme de ces merveilleux jardins, de l’inventivité et de la passion qui animent leurs créateurs

MERCI pour ce beau « reportage », merci à l’Apja pour ces grâces apportées depuis tant d’années. Que la France et les françaises, français sont beaux et bons !! et merci à cette nature qui ne nous lâche jamais. A bientôt, j’espère. Geneviève Woynar
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